Témoignage de Katya, abandonnée à la naissance
Mis à jour le 29 septembre 2022
Le Témoignage de Katya, abandonnée à la naissance, publié sur le site www.psychologie.com
« J’ai été trouvée dans la rue juste après ma naissance et placée pour l’adoption. Je ne connais pas mes parents biologiques, ni les circonstances de ma naissance et de mon abandon. Cela fait plus de onze ans que je recherche mes géniteurs, sans succès. Toutes les tentatives infructueuses me renvoient à mon statut d’enfant « trouvé » », écrivait Katya, alias Katsoon, dans le forum de Psychologies.com. Parce que son parcours pose de nombreuses problématiques, nous lui avons donné la parole, et sollicité l’éclairage de Fanny Cohen Herlem, pédopsychiatre, membre du Conseil Supérieur de l’Adoption et auteur de L’adoption (coll. Idées reçues, Cavalier Bleu).
Témoignage
J’ai 34 ans. J’ai été adoptée. Je l’ai toujours su.
Mais à 23 ans, j’ai éprouvé le besoin de connaître mes origines. Ce besoin a mûri au fil des années. La fin de l’adolescence et l’entrée dans l’âge adulte font naître des interrogations. C’est aussi le moment où l’on prend de la distance vis-à-vis de ses parents. A 23 ans, j’avais fini mes études, je n’habitais plus chez eux. Ne voulant pas leur faire de mal, j’avais peut-être repoussé cette quête. Jusqu’à cet âge où la nécessité de savoir d’où je venais s’est faite plus forte que la crainte de blesser mes parents adoptifs…
Je leur ai donc demandé mon dossier d’adoption, gardé précieusement durant toutes ces années. Mon père me l’a donné… à contrecœur, car il a pris cela comme une trahison. Ce n’est pas faute d’avoir été préparé, comme tout parent adoptant, à l’éventualité de cette démarche. Il n’était apparemment pas prêt, et m’en a voulu assez longtemps.
Le dossier était très mince. Des indications sommaires en anglais, d’autres en coréen. « Père inconnu, mère inconnue. Enfant abandonné » : voilà à quoi se résume mes origines selon les papiers officiels. Sur la fiche médicale, une annotation en anglais indiquait que j’avais encore mon cordon ombilical. Une autre, en coréen, précise que j’avais été trouvée devant une mairie.
Ces maigres informations ont ravivé mon désir de connaître mes origines. Ma famille de sang. Voyages en Corée à quatre reprises, recherches via les associations créées pour aider les adoptés à retrouver leurs parents biologiques, via la HOLT, organisation par laquelle mes parents étaient passés pour m’adopter ; petite enquête dans ma ville natale, grâce à une connaissance ; passage à la télévision coréenne… Cela fait plus de 10 ans que je multiplie les pistes de recherche. Sans succès.
Mon premier voyage – ou plus exactement retour – en Corée, à 26 ans, fut une expérience étrange. Des retrouvailles douloureuses. Je me suis sentie appartenir à ce pays, tout en éprouvant une certaine déception. Celle d’avoir été arrachée à ce lieu où j’aurais dû grandir, vivre. Mon corps a d’ailleurs réagi violemment : je suis tombée malade, j’ai dû me faire opérer. Comme si mes cellules avaient réagi à ce retour aux origines.
Le jour où – si j’y arrive un jour – je connaîtrai enfin l’identité de mes parents biologiques, je chercherai bien sûr à les rencontrer. J’ai des choses à leur dire, mais plus les mêmes qu’à 23 ans, mes sentiments ayant évolué avec les années. Entre 23 et 30 ans, j’ai éprouvé de la colère. J’en voulais à ma mère de naissance de m’avoir abandonnée. Plus aujourd’hui. Au fil de mes voyages en Corée, de mes rencontres avec des coréennes, j’ai appris à connaître la culture de ce pays. Une culture patriarcale où la femme a une piètre place… Où rien n’est fait pour les aider, en cas « d’accident ». Comprendre cela m’a permis de pardonner à ma mère biologique. A présent, j’aimerais simplement la voir. Qu’elle me parle de son histoire, de sa famille. Pour que je puisse enfin établir ma filiation, et me libérer de ce sentiment d’être née dans un dossier.
L’abandon marque à vie. On fait tout pour se faire accepter, on ne supporte pas d’être rejeté. Sur le plan sentimental, on est toujours en train d’essayer de réparer le mal qui a été fait. Partant de là, il est très difficile d’avoir une relation amoureuse « normale ». Je suis mariée à un homme qui a deux petites filles de son côté, délaissées par leur maman. Je m’occupe d’elles à plein-temps… Une façon peut-être, de réparer cet abandon que j’ai vécu, « d’expier » la faute de ma mère. J’ai toujours envie de faire la maman, de protéger ceux que j’aime. Ce besoin est plus fort que moi… même si j’ai conscience qu’il n’est pas très sain.
J’ai appris à me connaître, à analyser ma manière d’être, à comprendre l’impact de mon abandon sur les différents aspects de ma vie. Mon travail sur moi m’y a aidée. A 20 ans, j’ai débuté une psychanalyse, que j’ai poursuivie pendant un an. A 25 ans, j’ai fait une psychothérapie d’un an. Depuis, je vois ponctuellement un psychothérapeute, quand j’en éprouve le besoin. Il fait de l’EMDR, une méthode parfois très efficace dans le cas de traumatismes précoces durant l’enfance. Elle m’a beaucoup aidé.
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