Maltraitance infantile et trouble bipolaire
Mis à jour le 2 mai 2016
Le lien entre des antécédents de maltraitance dans l’enfance et une problématique psychiatrique ultérieure ne semble plus à démontrer.
Un tiers de la population mondiale a souffert d’expériences difficiles vécues pendant l’enfance (Kessler et coll., 2010) : agressions sexuelles, maltraitance physique et émotionnelle, négligence physique et émotionnelle, brimades, décès de parents, perte de la mère ou du père, séparation…
Les conséquences à l’âge adulte sont multiples : hausse de la criminalité, baisse du niveau d’éducation, impact sur la santé (Sachiapone et coll., 2009; Scher et col., 2004), risque plus élevé de troubles psychiatriques (Kessler et coll., 2010; Green et coll., 2010; Kessler et coll., 1997)
Plus de 50 % des personnes souffrant d’un trouble bipolaire rapportent avoir été victimes d’abus physiques ou sexuels dans leur enfance (4,5)
Dans une méta-analyse intitulée Les expériences difficiles vécues pendant l’enfance (Cas) augmentent le risque de psychose : Une méta-analyse de contrôle. Etudes prospectives et comparatives transversales (1), les auteurs ont consulté 40 études et concluent que toutes les expériences difficiles vécues pendant l’enfance représentent un facteur de risque et qu’au moins 33% de tous les troubles psychotiques pourraient être prévenus grâce à la prévention et au traitement thérapeutique des expériences difficiles vécues pendant l’enfance.
Dans une étude portant sur le rôle du traumatisme vécu pendant l’enfance dans le trouble bipolaire (2), les auteurs concluent que les CAs représentent des facteurs de risque du TB. Elles contribuent à l’aggravation des résultats avec une augmentation du nombre d’épisodes, une détérioration cognitive, plus de tentatives de suicide, plus de troubles liés à la consommation de substances, une apparition plus précoce de la maladie. Ceci est potentiellement médié par une inflammation chronique, un raccourcissement des télomères, une réduction des BDNF et des changements fonctionnels et structurels du cerveau. Des auteurs suggèrent une évaluation de routine du trauma d’enfance chez le trouble bipolaire mais déclarent également qu’il y a peu de témoignage permettant de savoir quelle thérapie choisir.
Dans une étude dirigée par Ronald Kessler (6), intitulée l’ESPT dans l’enquête nationale sur la comorbidité, publiée en 1995, les auteurs ont étudié un échantillon de 5877 patients présentant un ESPT et concluent que les hommes ont 7 fois plus de chance de développer un trouble unipolaire quand ils ont un ESPT, et que les femmes ont 4 fois plus de chance de développer un trouble unipolaire ou maniaque.
Les données recueillies dans une étude néo-zélandaise (3) incitent les auteurs à conclure que l’association entre un contexte de maltraitance et des troubles psychopathologiques ultérieurs réside essentiellement dans les séquelles des mauvais traitements eux-mêmes, et non dans leur simple impact mnésique. Survenant en moyenne une dizaine d’années après les mauvais traitements subis dans l’enfance, ces pathologies consistent notamment, par ordre de fréquence, en des phobies sociales ou autres (30 % des cas), des troubles de l’humeur (24 %, avec surtout des troubles dépressifs majeurs : 14 %), une dépendance à l’égard de l’alcool (12 %), un syndrome de stress post-traumatique (11%), une addiction à une drogue (9 %), des troubles paniques (4%), des troubles obsessionnels compulsifs (3 %), des troubles anxieux généralisés (2 %).
Sources de l’article Maltraitance infantile et trouble bipolaire :
(1) Varese, F., Smeets, F., Drukker, M., Lieverse, R., Lataster, T., Viechtbauer, W., … & Bentall, R. P. (2102) Childhood Adversities Increase the Risk of Psychosis: A Meta-analysis of Patient-Control, Prospective- and Cross-sectional Cohort Studies,
(2) Monica Aas, Chantal Henry, Ole A. Andreassen, Frank Bellivier, Ingrid Melle and Bruno Etain (2016) The role of childhood in bipolar disorders, International Journal of Bipolar Disorders20164:2
(3) Scott KM et coll. (2010) Prospectively ascertained child maltreatment and its association with DSM-IV mental disorders in young adults. Arch Gen Psychiatry ; 2010; 67: 712-719.
(4) Goldberg J.F., Garno J.L. (2005) Development of posttraumatic stress disorder in adult bipolar patients with histories of severe childhood abuse. J Psychiatr Res. 2005;39:595-601.
(5) Conus P., Cotton S., Schimmelmann B.G. Pretreatment and outcome correlates of past sexual and physical trauma in 118 bipolar I disorder patients with a first episode of psychotic mania. Bipolar Disord. 2010;12:244-252.
(6) Kesler, Sonnega, Bromet, Hughes, Nelson (1995) , Posttraumatic stress disorder in the national comorbidity survey, in Arch Gen Psychiatry, 52:1048-1060
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