ENTRETIEN. Guerre en Ukraine : quel est l’impact du conflit sur la santé mentale ?
Mis à jour le 15 mars 2022
ENTRETIEN. Guerre en Ukraine : quel est l’impact du conflit sur la santé mentale ?, interview d’Eric Bui, psychiatre au CHU de Caen, réalisée par Nathalie Travadon, publiée sur le site de Ouest France .
Extraits
Éric Bui, psychiatre au CHU de Caen et professeur de psychiatrie à l’UFR santé de Caen, ex-président de la Société internationale d’étude du stress post-traumatique, est spécialiste des traumatismes de la guerre. Il explique les répercussions du conflit en Ukraine sur la santé mentale. Entretien.
Quel impact peut avoir cette guerre sur notre santé mentale déjà fragilisée par la crise sanitaire ?
Les facteurs de stress sont toujours des facteurs de risque d’altération de la santé mentale. Même si ce n’est pas du stress post-traumatique à proprement parler, l’exposition en continu et permanente aux contenus médiatiques, surtout à ceux à fortes sensations, peut affecter le sommeil et augmenter l’anxiété. Dans ce cas, il est important d’avoir recours au soutien social. Un soutien certes limité ces deux dernières années en raison des mesures de distanciation, mais qui peut désormais jouer pleinement son rôle avec la levée des dernières restrictions.
Les personnes qui ont déjà vécu des conflits armés sont-elles plus affectées ?
La médiatisation de la guerre en Ukraine et de ses répercussions sur les populations peut affecter à distance en réactivant des traumatismes anciens chez des personnes exposées à des situations similaires par le passé. Cela peut concerner des militaires déployés dans des conflits armés, mais aussi les populations civiles qui ont connu et fui les différentes guerres du dernier siècle écoulé : Seconde Guerre mondiale bien sûr, mais aussi la guerre d’Algérie, celle du Vietnam, les conflits en Irak, Syrie, et Afghanistan. Cela peut réactiver des symptômes de stress post-traumatique. En général, cette réactivation du trouble peut aussi être une bonne opportunité pour chercher de l’aide et recevoir un traitement adapté.
La guerre peut-elle avoir un impact particulier sur les jeunes en France, particulièrement touchés par le stress lié à la pandémie ?
D’une manière générale, les traumatismes ont toujours un impact à distance, quelle que soit la tranche d’âge. Dans les études menées sur les répercussions des attentats du 11 septembre 2001 à New York, on a observé que plus on se rapprochait géographiquement du lieu des attentats, plus la demande de soins en santé mentale augmentait.
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Quelles conséquences à long terme chez les enfants et les jeunes qui doivent s’exiler ?
Les enfants, d’une manière générale, sont résilients : ils ont d’assez bonnes capacités d’adaptation face au stress. Sous réserve, bien sûr, que leur environnement leur procure une certaine stabilité. Il est difficile de prédire ce devenir, sans connaître celui des parents et sans connaître les réseaux de soutien social qui seront mis en place ou pas dans le pays d’accueil.
Quelles solutions pour aider les personnes victimes de stress traumatique ?
Même si certains médicaments sont indiqués pour le trouble de stress post-traumatique, je pense notamment aux antidépresseurs, les recommandations internationales recommandent en première intention des psychothérapies standardisées centrées sur le traumatisme. Il s’agit de l’EMDR (1), mais aussi de deux thérapies cognitives et comportementales : l’exposition prolongée et la thérapie de processus cognitifs.
(1) L’EMDR (Eye movement desensitization and reprocessing) ou « Désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires » est une méthode fondée par la psychologue américaine Francine Shapiro. Elle consiste à guérir les traumatismes et les événements douloureux par des mouvements oculaires
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