EMDR ou Thérapie Cognitivo-Comportementale?
Mis à jour le 29 septembre 2022
Un article EMDR ou Thérapie Cognitivo-Comportementale ? Les réponses de Didier Havé.
Qu’est-ce que la thérapie cognitivo-comportementale?
Prenons un exemple très classique d’une personne qui consulterait un psychologue car elle ne peut plus prendre le métro depuis quelques mois. Nous retrouvons en général sans difficultés les trois composantes suivantes de la vie psychique :
- émotions : peur intense au cours d’attaques de panique lors de déplacements antérieurs en métro.
- pensées : perceptions d’une catastrophe imminente, d’un danger pour sa vie ou sa santé lors de ces expériences et ensuite.
- comportements : classiquement, la personne quitte le métro qu’elle perçoit dangereux au plus vite (comportement d’échappement) et ne le reprend plus (comportement d’évitement) ce qui produit à la fois du soulagement en même temps que cela perpétue la peur irrationnelle d’être en danger dans le métro.
C’est pourquoi cette personne consultant en TCC serait d’abord invitée à modifier sa manière de percevoir la situation (pensées) dans un sens moins catastrophique. Ensuite, le psychologue lui proposerait de changer sa façon d’agir face aux déplacements en métro (comportements) en lui faisant réutiliser progressivement ce moyen de transport.
Quels sont les points communs entre EMDR et TCC?
EMDR et TCC ont également en commun d’envisager la relation thérapeutique entre le client et le thérapeute de manière similaire, à savoir comme une relation de collaboration non hiérarchique. Il n’y a pas d’un côté un professionnel omniscient et de l’autre une personne dont l’avis sur ses difficultés ne comptent pas. Bien au contraire, thérapeute et client travaillent ensemble sur le problème ou la problématique à résoudre, en échangeant leurs idées et leurs hypothèses sur le traitement en cours.
De plus, ce sont deux formes de thérapie structurées et pragmatiques. Cela pourrait paraître anecdotique, pourtant, un grand nombre de thérapies n’aboutissent nulle part simplement parce qu’aucune direction et aucun objectif thérapeutique ne sont fixés au début du traitement. Rapidement, la thérapie devient une relation de soutien où le client vient parler des problèmes qu’il a affrontés durant la semaine ou la quinzaine écoulée. Et il recommence à la séance suivante. Finalement, la thérapie n’a résolu de cette manière aucun des problèmes qui ont conduit la personne à consulter et même, dans une certaine mesure, elle a créé un autre problème. En effet, le client est devenu dépendant de l’écoute bienveillante de son thérapeute et se trouve de ce fait encore moins autonome qu’avant la thérapie.
Enfin, EMDR et TCC partagent comme technique d’intervention une part d’exposition. L’exposition confronte délibérément la personne à l’objet de sa crainte. Ainsi, l’exposition est en quelque sorte le contraire du comportement d’évitement présenté plus haut. C’est en raison de ce dernier point que certains thérapeutes cognitivo-comportementalistes assimilent par erreur la thérapie EMDR à une « TCC avec des mouvements oculaires ».
Quelles sont les différences entre EMDR et TCC?
Mon autre critique concerne la restructuration cognitive. Cette dernière est la technique qu’utilise la TCC pour changer les croyances irrationnelles de la personne. Ainsi, pour reprendre l’exemple du patient qui souffre d’attaques de panique dans le métro, le thérapeute cognitivo-comportemental va lui apprendre à modifier sa manière de penser lorsqu’une crise se présente. Le client est d’abord invité à identifier son monologue intérieur catastrophiste (par exemple « je vais mourir, m’étouffer, faire une crise cardiaque, perdre le contrôle » etc.) et à le changer (« Ces sensations sont inconfortables mais elles ne sont pas dangereuses« , « j’ai déjà eu de nombreuses attaques de panique et rien de grave n’est arrivé pour ma santé physique ou mentale » etc.). Bien que parfois efficace, et reconnue comme telle, cette technique est loin de convenir à tous les clients dont beaucoup comprennent rationnellement le caractère excessif de leurs pensées mais n’éprouvent pas émotionnellement l’impact d’en changer pour d’autres plus réalistes.
A l’inverse, la thérapie EMDR cible directement les sources historiques dans la vie de la personne de ses difficultés. C’est donc une thérapie de la mémoire pour l’essentiel et donc du passé en tant que ce passé, irrésolu, continue d’affecter la personne dans sa vie présente. Ce processus est souvent à la fois émotionnel, physiologique et cognitif. C’est ce qui en assure sa force immense de changement. Comme par ailleurs il se produit spontanément au cours du retraitement et donc sans intervention du thérapeute, son impact en est décuplé et les changements n’ont pas le caractère parfois artificiel qui caractérise la restructuration cognitive (le client essayant de se « convaincre » de son nouveau monologue intérieur). Par exemple, il est fréquent que l’on identifie dans le trouble d’anxiété sociale des expériences d’intimidation scolaires. Sans un travail d’intégration des souvenirs les plus douloureux de cette période de la vie de la personne on n’obtient souvent que des progrès en surface, certes appréciables (par exemple un meilleur contact oculaire en situation sociale, une diminution des évitements des situations sociales, etc.), mais insuffisants à changer l’image négative que la personne s’est construite d’elle-même.
La thérapie EMDR est-elle une forme de thérapie cognitivo-comportementale?
C’est aussi pour cette raison que les thérapeutes EMDR parlent d’intégration. En retraitant les souvenirs douloureux ou traumatiques, la personne semble se réapproprier les aspects de son histoire de vie même les plus pénibles. Ce traitement est donc plus que cesser de souffrir à l’évocation de tel ou tel souvenir (désensibilisation). L’intégration donne l’impression d’une croissance personnelle parce que le sentiment d’identité est vécu comme plus stable et plus solide.
Devez-vous privilégier une thérapie EMDR à une TCC?
La réponse est avant tout personnelle. La psychothérapie est une affaire de rencontre entre deux individus et, il faut le redire, la confiance que vous aurez en votre thérapeute est absolument primordiale et il est probable que celle-ci sera d’autant plus grande que votre thérapeute sera à l’aise avec ses outils.
Par ailleurs, il est heureux que les traitements psychologiques offrent aujourd’hui une multitude de possibilités. Toutefois, pour ma part et pour les raisons que j’ai présentées ici, l’EMDR est la thérapie qui a de très loin ma préférence par rapport à toutes les autres y compris la TCC et en dépit de l’efficacité de cette dernière.
Didier Havé a été formé chez nous. Il est psychologue membre de l’Ordre des psychologues du Québec, titulaire de la fonction publique hospitalière française, praticien certifié EMDR International Association et EMDR-Europe, superviseur en cours d’accréditation EMDR International Association, Facilitateur EMDR pour la Niagara Stress and Trauma Clinic. Vous pouvez le retrouver sur son site : http://www.psyemdrmontreal.com/
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