Quatre médicaments, ou une alimentation différente ?
Mis à jour le 14 octobre 2022
David Servan-Schreiber – Psychologies Magazine – Avril 2008
Lorsque j’étais à Pittsburgh, je souffrais souvent de brûlures d’estomac. J’en ai parlé à des collègues qui m’ont avoué prendre chaque soir un anti-acide pour éviter ce type de désagrément. A la même époque, je suis tombé sur une affiche publicitaire pour une nouvelle chaîne de restauration rapide : un symbole de la pensée médicale moderne. Au-dessus d’une part de pizza particulièrement épaisse, débordant de lourd fromage grillé et garnie de toute sorte de charcuterie, ce slogan quasi-hallucinatoire : « La seule chose qui lui manque, c’est l’anti-acide ».
Un des défauts les plus flagrants de notre système de santé, c’est de traiter chaque symptôme de notre corps par un médicament, sans jamais prendre en compte le fait qu’il n’est souvent que le reflet d’un déséquilibre dans notre style de vie. Pour suivre ses patients, un bon généraliste mesure par exemple régulièrement la tension artérielle, le taux de glucose dans le sang, la sécrétion d’insuline, le cholestérol, les triglycérides, les facteurs d’inflammation, en plus du poids et du tour de taille (des indicateurs certains d’une dégradation de l’état général de santé s’ils augmentent trop). Si les valeurs sont anormales, il prescrira, pour chacun de ces tests, un médicament particulier : un anti-hypertenseur, un hypoglycémiant, une statine pour réduire le cholestérol, un anti-inflammatoire… C’est ainsi qu’un bon nombre de personnes de plus 65 ans prennent une petite poignée de médicaments chaque jour, résultat de l’implacable logique « un symptôme-une pilule ».
En Italie, au début des années 2000, un groupe de chercheurs de l’université de Naples à fait une démonstration éblouissante d’une autre manière de traiter ces problèmes. Ils ont choisi cent quatre-vingts patients dont la biologie était désorganisée selon le modèle occidental habituel : surpoids, hypertension, trop de cholestérol, trop d’inflammation, trop de sucre et d’insuline dans le sang. La moitié de ces patients ont suivi un régime « sain » pauvre en cholestérol. L’autre moitié, un régime méditerranéen. Au bout de deux ans, les résultats, étaient spectaculaires : les patients qui avaient suivi le régime méditerranéen avaient vu une amélioration de tous les paramètres de santé. Sans un seul médicament.
Moins de tension artérielle, moins de cholestérol et triglycérides, une glycémie plus proche de la normale, l’inflammation contrôlée, et même une perte de poids de quatre kilos en moyenne (contre un kilo dans l’autre groupe) (1). Pas un seul médicament au monde ne peut avoir autant d’effets positifs en même temps sur la santé. Mais, non brevetable, ce régime miracle ne fait l’objet que de peu de recherche et n’est que rarement enseigné dans les facultés de médecine.Et avec ce type d’alimentation, plus besoin de prendre d’anti-acide pour les brûlures d’estomac…
Les principes du régime méditerranéen
– Huiles de colza et d’olive exclusivement - Volaille ou poisson cinq fois par semaine - Lentilles, pois chiche, riz, céréales complètes plusieurs fois par semaine - Légumes/salade à chaque déjeuner et dîner - Pas de jour sans fruits - Noix, et plantes aromatiques en accompagnement (ail, oignons, ciboulette, romarin, thym, etc.)
1. « Effect of a Mediterranean-Style Diet on Endothelial Dysfunction and Markers of Vascular Inflammation in the Metabolic Syndrome: A Randomized Trial » de Esposito K, Marfella R, Ciotola M, et al., JAMA 2004;292(12):1440-6.
Avril 2008