Défenses immunitaires : nos émotions à la rescousse
Mis à jour le 14 octobre 2022
David Servan-Schreiber – Psychologies Magazine – Mars 2001
Si le corps était une société, le système immunitaire serait sa police. Des globules blancs circulent continuellement et partout pour dénicher les intrus : une bactérie, une cellule infectée par un virus, un groupe de cellules cancéreuses qui commencent à devenir trop important. Mais ce n’est pas une police britannique aux manières respectueuses et sans armes. Lorsqu’une cellule anormale est détectée, les « natural killer cells » (cellules tueuses naturelles, dites « NK ») l’entourent immédiatement et lui injectent un poison qui fait littéralement éclater sa membrane et la détruit sur-le-champ. Après la bataille, d’autres cellules blanches, appelées macrophages, nettoient les débris et soumettent ces indices aux cellules NK qui détecteront plus rapidement de nouveaux intrus.
On sait depuis longtemps que plus ce système de défense fonctionne bien, moins l’organisme sera sujet aux maladies du vieillissement (arthrite, cancer, et même sénilité).
Ce qui est nouveau, ce sont les découvertes des vingt dernières années qui ont démontré que ce système immunitaire n’est pas indépendant – comme on l’a cru longtemps – de nos pensées et de nos émotions, mais y est au contraire soumis à chaque instant.
C’est d’abord Ader qui, en 1975, montre que l’on peut modifier le comportement des globules blancs en le conditionnant (1), de la même façon que les chiens de Pavlov pouvaient être conditionnés à saliver au son d’une cloche. Dix ans plus tard, Felten apporte un début d’explication à cet étrange phénomène : la matrice, qui produit les globules blancs et les stocke en attendant qu’ils entrent en action, est bel et bien innervée par des ramifications du cerveau (2). Presque au même moment, Shavitz confirme que la surface des globules blancs comporte des récepteurs qui leur permettent de recevoir des messages à travers les neuro-hormones sécrétées par le cerveau (3). Et quelques années plus tard, Cohen démontre que les individus stressés exposés directement au virus du rhume développeront plus souvent la maladie (4). Il confirme ainsi l’implication pratique de ces découvertes théoriques : si le cerveau « n’y croit plus », le système immunitaire lui aussi lâche la barre. C’est le début d’une nouvelle discipline scientifique : la psycho-neuro-immunologie, qui étudie le lien neurologique entre la vie psychique et l’activité immunitaire, et qui constitue l’un des piliers de la nouvelle médecine « corps-esprit ». La clé qui permet de comprendre comment se sentir mieux dans sa tête aide aussi à se sentir mieux dans son corps.
1- In “Psychosom. Med.”, 1975.
2- In “Journal of Immunology”, 1985.
3- In “Science”, 1984.
4- In “New England Journal of Medicine”, 1991.
STIMULATION : Comment renforcer ses défenses
Certaines activités stimulent notre système immunitaire :
• la relaxation (méditation, yoga) ;
• l’exercice physique ;
• la rencontre avec les autres (ou avec Dieu) ;
• le rire ;
• les activités de groupe (chorale, etc.), qui donnent le sentiment d’appartenir à un tout plus grand que soi.
Bref, tout ce qui donne à la vie un peu plus de sens.